Grozny Nine Cities, est un webdocumentaire qui nous plonge dans société tchétchène, diffusé sur le site de Polka Magazine et présenté dans « Histoires connectées »du jeudi 20 février 2014, la chronique dans l’Hyper revue de presse d’Olivier Emond avec Fabienne Sintes, tous les jeudi à 9h15 sur France Info.
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La chronique écrite :
Claire Leproust : Je propose de commencer par faire un petit rappel historique sur la Tchétchénie, ce pays dont on a si souvent entendu parler, avant de raconter le webdocumentaire.
C’est un pays détruit par deux guerres très récentes, la première en 1994, quand Boris Eltsine envoie 30 000 hommes pour refuser l’indépendance qu’avait proclamée le président tchétchène. La Russie ne pouvait alors pas stratégiquement laisser partir ce pays riche en pétrole. La résistance tchétchène est alors féroce et la Russie finit par bombarder la capitale Grozny, entrainant la mort de 80 à 100 000 personnes. Puis, de nouveau en 1999, cette fois-ci, c’est en réponse à des actes terroristes des indépendantistes tchétchènes contre les russes, que Grozny est de nouveau bombardée.
C’est de ce pays que 3 jeunes photographes russes ont voulu s’intéresser de près à l’aube des jeux olympiques de Sotchi.
C’est une réalité très complexe que l’on trouve au travers de reportages vidéos et photos qui laissent voir une société d’après guerre en pleine mutation entre valeurs traditionnelles caucasiennes et musulmanes et l’envie de modernité.
Olivier Emond : Complexe mais c’est avant tout une réalité de vie très dure qui est montrée tout au long de ce webdocumentaire, à commencer par un chef de la république tchétchène régulièrement accusé d’exécutions sommaires et d’enlèvements.
C.L : Il s’appelle Ramzam Kadirov, il doit son pouvoir au Kremlin et sait que sa situation est fragile. C’est lui qui est également accusé d’avoir joué un rôle dans l’assassinat de deux femmes journalistes Anna POLITKOVSKAYA en 2006 et Natalia ESTEMIROVA en 2009 qui dénonçaient régulièrement les dérives du pouvoir russe en Tchétchénie.
Kadirov s’autonomise aussi par exemple en voulant faire de son pays une république islamiste intégriste, il impose le port du voile aux femmes et l’interdiction de l’alcool.
O.E : Ce qui au passage n’est pas totalement dans la tradition russe…
Oui ! et c’est plutôt contradictoire avec les coutumes tchétchènes, il semble que la motivation soit aussi politique que religieuse, celle de lutter contre le djihad islamiste salafiste qui progresse dans le pays.
Il y a des séquences très dures d’archives de la dernière guerre. Des images de guerre, surtout là pour appuyer le fait que le travail de mémoire n’est pas fait, des fosses communes ont été oubliées, des actes sauvages impunis, mais malgré la douleur sourde au fond de soi, la vie continue…
O.E : Dernier point à souligner , celle de la condition de vie des femmes tchétchènes assez rétrogrades.
C.L : Malgré le rôle qu’elles ont joué quand leur mari étaient à la guerre, les femmes sont souvent reléguées à la cuisine, dans l’ombre, elle peuvent être répudiées voire tuées si elles font honte à leur famille et quand elles divorcent, les enfants restent à la garde de la belle famille. On comprend que c’est ce qui se passe en tous cas dans les familles traditionnelles ou religieuses.
Ce webdocumentaire « GROZNY NINE CITIES » été réalisé par trois photographes russes, dont l’une, Olga Kravets, a gagné un premier prix de la fondation MAGNUM. Cette œuvre interactive a été produite par Chewbahat Storytelling, et est diffusé sur le site de Polka Magazine.